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Patois, dialectes et langues régionales

Parce que la région Grand Est recouvre tout ce qui, en France, se trouve au nord-est de la région parisienne, elle contient logiquement toute la gradation qui va de la langue de la vieille Île-de-France aux frontières des langues germaniques. On pourra explorer cette dimension linguistique de la diversité à travers les fonds littéraires de ces territoires. De la présence d’expressions particulières disséminées dans des textes par ailleurs purement français, on passera aux différents parlers locaux, plus prégnants dans certaines zones. La littérature explore l’expressivité et l’originalité de ces faits linguistiques, dans le double but d’en profiter d’abord, de les diffuser et de les conserver. De là, l’exploration pourra se poursuivre vers des patois plus affirmés, où les traits distinctifs peuvent être définis avec plus de précision et où parfois la francophonie prend des couleurs nouvelles. L’accent peut transparaître dans la langue écrite, parfois en tant que trait visant à rendre la verve locale, l’humour d’un terroir, l’originalité d’un type de communication, ou parfois en tant que patrimoine qu’il faut apprendre à respecter en le consignant par l’écrit.

Le dialecte est un mot valise, car un dialecte contient des variantes importantes à l’intérieur de lui-même. De plus le dialecte se définit par rapport à une branche linguistique, et une langue est un dialecte qui a mieux réussi qu’un autre et s’est imposé en tant que langue nationale ou internationale. Le dialecte peut être appelé langue régionale car il est particulier à une région, non pas administrative mais culturelle au sens très large du terme. Dans le Grand Est on trouvera des dialectes à rattacher à différentes langues, à des langues très différentes : au français et à l’allemand pour faire vite. L’étude des dialectes a pour matière première l’oralité, car ce n’est que tardivement qu’est apparu l’usage d’écrire en dialecte. Nombre d’écrivains ont tenu à explorer, à recenser, à enregistrer ces réalités dialectales avec les mêmes buts que pour les patois. S’y ajoute parfois une revendication de particularisme, de reconnaissance d’une diversité culturelle, d’une origine autre parfois, jusqu’à l’affirmation d’une altérité existentielle, voire plus encore.

Dans certaines zones, le vécu dialectal peut avoir été très douloureux car la question de la langue s’y est posée à plusieurs reprises au cours des périodes récentes. Certains écrivains se sont vu « couper la langue » parce que leur langue maternelle, celle de leur enfance, de leurs émois les plus intenses, de leurs années de formation, est soudain devenue celle de l’ennemi. Leur dialecte, leur manière d’interpréter cette langue, a directement pâti de cet opprobre. Utiliser le dialecte était signe de quelque chose que la littérature nationale rejetait parfois violemment.  Or, on n’écrit que dans une langue que l’on aime et qu’on veut partager avec de nombreux et amicaux lecteurs. Il a fallu choisir : le silence ? un repli dans la sphère purement locale ? l’usage de la langue des nouveaux compatriotes ? l’usage en littérature d’une langue devenue « étrangère » ? ou encore l’acceptation du rôle subalterne de traducteur, de passeur ?

Car aux extrémités du Grand Est il y a l’Etranger, avec ses langues radicalement différentes. On quitte complètement le monde des racines latines. Nos fonds littéraires parcourent tout ce spectre, toute cette richesse. On peut voyager d’un extrême à l’autre, et les écrits sur lesquels la recherche linguistique et la dialectologie se sont basés pour établir le savoir sur ce sujet se trouvent souvent dans nos bibliothèques. Certains de ces fonds sont même représentatifs de ce qu’il y a de plus abouti, de plus significatif quant à tel ou tel mode d’expression, patois, dialecte ou langue. Une sélection de fonds riches en la matière est proposée à l’internaute et, nous l’espérons, apportera une dimension plurielle à la représentation que l’on aura de la vie littéraire de notre grande région qui, du point de vue le la langue, est plurielle.

Daniel Bornemann (BNU)

Voir l’Atlas sonore des langues régionales de France : accéder au site
Une même fable d’Ésope peut être écoutée et lue en français (en cliquant sur Paris) et en langues régionales (en cliquant sur les différents points de la carte).

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